[(The Beatles x iTunes) + (Take That x 235 000)] = le curieux marché anglais

Le 17 novembre 2010

Incroyable, les Anglais achètent toujours de la musique. Et beaucoup ! Cette semaine promet des résultats énormes et surprenants grâce aux deux boybands les plus célèbres du pays : The Beatles et Take That. God save the pop ?

Le marché musical de nos voisins britanniques réserve décidément bien des surprises. Alors que la barre symbolique des cinq cents millions de téléchargements légaux a été passée en septembre dernier, que leurs chiffres de ventes de musique ont de quoi faire pâlir tous leurs voisins, et que chaque semaine des records tombent, cette semaine devrait laisser des traces.

Ce qui frappe avant tout dans les charts de nos voisins anglais, c’est que leurs ventes de musique sont comparables à celles d’avant la crise. Ils ont en effet largement pris le pli du numérique, notamment pour les singles : le numéro un actuel (Rihanna) a vendu 93 426 titres dont 91 736 en numérique, 1501 CD et 189 “digital bundles”. Chez nous, où l’on comptabilise toujours les ventes numériques à l’écart des ventes physiques, la réalité est tout autre : si une René la Taupe rafle la mise en CD (3 999 ventes, il vous suffit d’ailleurs de vendre 125 disques pour être 20ème du classement…), c’est Shakira qui gagne en numérique, mais avec seulement 15 038 clics sur “acheter”.

Deux groupes de garçons sont par ailleurs au coeur de l’actualité britannique cette semaine. À ma gauche The Beatles, qu’on ne présente plus, et à ma droite, Take That, groupe dont je résume le parcours en quelques lignes, puisque nombre de non-anglais ont toujours en tête l’image des années 90.

Premier “grand” boyband de la vague des 90’s, les cinq Mancuniens ont profondément marqué la culture populaire de leur terre natale, qui a moins bien de problèmes de conscience et de bien-pensance que chez nous, semble-t-il. Séparés en 1996 suite au départ de Robbie Williams (dont la carrière solo l’a mené au premier rang des performers masculins mondiaux durant plus d’une décennie), le groupe s’est reformé en 2006 à quatre, pour une tournée des stades en premier lieu (durant laquelle ils jouaient avec un certain humour sur leur passé de groupe pour jeunes filles en fleurs), puis un album. Le succès est comparable à celui des premières années, c’est-à-dire gigantesque, avec 2,6 millions de disques vendus rien qu’au Royaume-Uni, un BRIT Award et une tournée à guichets fermés. Rebelote en 2008, où l’album The Circus s’est vendu à 433 000 exemplaires au cours de sa première semaine d’exploitation. Un autre Brit Award en poche et une tournée des stades plus tard, le groupe annonce que Robbie Williams effectuera son retour avec ses anciens bandmates fin 2010.

L’album Progress est sorti ce lundi 15 novembre (au lendemain d’une performance live dans l’émission X Factor qui draine 15 millions de téléspectateurs chaque semaine) et a déjà marqué l’histoire des charts. En une journée de commercialisation, le disque s’est écoulé à 235 000 exemplaires, devenant donc le disque le plus vendu en une journée au XXIe siècle. En deux jours, ils en sont à 305 000, soit  Le record précédent appartient au Be Here Now d’Oasis qui avait trouvé 350 000 preneurs en… 1997, soit bien avant ce que l’on appelle aujourd’hui la crise du disque. Sans compter que le quintette a écoulé 1,1 million de places de concert pour sa prochaine tournée estivale qui visitera les stades du pays, dont sept fois le mythique Wembley Stadium de Londres, et ce en une journée, mettant à mal tous les sites de vente en ligne ainsi qu’une partie du réseau téléphonique britannique.

Ces chiffres sont évidemment énormes dans le contexte actuel, largement supérieurs aux prédictions (le premier disquaire du pays, HMV tablait sur un premier jour à 150 000 ventes), mais pas si surprenants pour un marché britannique qui se porte bien mieux que le nôtre. Ou plutôt pour un marché où la population achète quasiment autant de disques qu’il y a dix ans. Le top 50 des ventes contient actuellement vingt albums vendus à plus de 200 000 exemplaires, dont quatre dépassent le million et demi. Cette semaine, le numéro un du top français (Florent Pagny) culmine à 24 864 ventes en première semaine alors que dans le même temps le disque le plus vendu outre-Manche (Susan Boyle) s’écoule à 102 993 exemplaires.

Les tops anglais risquent de subir un second assaut cette semaine, cette fois-ci de la part des ancêtres des Take That, un autre boyband (du calme, les puristes) qui a marqué l’histoire de la musique à une échelle bien plus importante encore. The Beatles, of course.

Après un buzz de près de 24 heures lancé par iTunes lundi, qui annonçait modestement que “demain est un autre jour, que vous n’oublierez jamais”, les fans des Fab Four peuvent se réjouir : le catalogue des Liverpudliens est désormais disponible sur le magasin en ligne de Steve Jobs.

C’est donc au terme d’années de bras de fer entre Apple Corps (l’éditeur du groupe) et Apple que seize albums des Beatles sont disponibles en téléchargement légal. Les prix sont sensiblement supérieurs à ceux pratiqués par la plate-forme pour les autres artistes, puisqu’un LP coûtera 12,99€ aux fans. Les titres à l’unité quant à eux sont proposés au même tarif que les nouveautés, soit 1,29€.

Si la présence d’un tel catalogue était évidemment indispensable chez le premier revendeur de musique en ligne, et son absence une absurdité autant commerciale qu’artistique, on imagine sans peine que les possesseurs des œuvres du groupe les ont numérisées depuis bien longtemps. Sauf qu’à peine trois heures après la mise à disposition des fichiers numériques, pas moins de cinq albums des Beatles se trouvaient dans le top 20 d’iTunes US. Combien d’entre eux seront classés dans les prochains charts anglais et américains ? On peut très bien imaginer le quartet de Liverpool squatter le top 10 anglais à la publication du prochain classement dimanche soir. Pour l’heure les quatre garçons dans le vent grimpent petit à petit dans le top album, prouvant que vieux ou neuf, les Anglais aiment ce qu’ils nomment leurs “national treasures”.

Quoiqu’il en soit, le classement de dimanche soir devrait marquer les annales.

Allez, parce que tout ça n’est finalement que de la musique pop, je vous laisse avec une bonne mise en abîme… (toujours pas de medley Take That par les Beatles, cela dit).

Crédits photos : LDR / Loguy (clé)

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