Le collège Hadopi au scalpel du Docteur House

Le 31 décembre 2009

En ce 26 décembre 2009, les autorités ont eu le plaisir de nous annoncer la naissance de la commission de la HADOPI. La soucoupe tenait à leur souhaiter la bienvenue dans le monde délicieux du Social Web avec une petite présentation de circonstance.

En ce 26 décembre 2009, les autorités ont eu le plaisir de nous annoncer la naissance de la commission de la HADOPI. La soucoupe tenait à leur souhaiter la bienvenue dans le monde délicieux du Social Web avec une petite présentation de circonstance.

Par décret en date du 23 décembre 2009, publié au J.O le 26 décembre 2009, sont nommés membres du collège de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet :

Membres désignés par le vice-président du Conseil d’Etat:


Jean Musitelli
, Conseiller d’Etat et président de l’ARMT (Autorité de régulation des mesures techniques), il fut notamment conseiller diplomatique (1984-1989) et porte-parole (1991-1995) du Président de la République, chargé de mission auprès du ministre des affaires étrangères (1990-1991 et 1997), ambassadeur de France auprès de l’UNESCO (1997-2002) et membre du groupe d’experts internationaux chargés par le directeur général de l’UNESCO d’élaborer l’avant-projet de convention sur la diversité culturelle (2003-2004). Donc, une vraie compétence pour diriger cette Hadopi. Une vraie valeur de technicien connaissant les enjeux du sujet.

Sa bio assez peu complète est disponible ici. Malgré tout, il reste expert en stratégie… et en matière culturelle …

Suppléant : Marie Picard.

Membres désignés par le premier président de la Cour de cassation:

Marie-Françoise Marais, Conseiller à la Cour de cassation, membre de l’ ARMT et vice-présidente du CSPLA (Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique), elle n’est donc pas juge et partie. «Placé sous la tutelle du ministère de la Culture, le CSPLA avait dans un rapport rejeté l’idée que le téléchargement sur les réseaux P2P puisse être un acte de copie privée, plaidé pour la responsabilité pénale des éditeurs de logiciels de P2P, et pour un renforcement des DRM», rappelle Numerama . La compétence judiciaire accolée à la compétence en termes de droits d’auteurs… judicieux mélange.
Suppléant : Dominique Garban (conseiller à la cour de cassation de Paris, membres du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles)

Membres désignés par le premier président de la Cour des comptes :

Patrick Bouquet, Conseiller maître à la Cour des comptes et membre de l’ ARMT . Conseiller-maître à la Cour des Comptes, Directeur du cabinet du ministre du commerce et de l’artisanat (1976-1977), Directeur des finances de la région Ile-de-France (1982-1986), Directeur général des collectivités locales au ministère de l’intérieur (1986-1989), Secrétaire général du groupe central des villes nouvelles (1993-1994) et Secrétaire général adjoint de la ville de Paris (1994-2001). Une vraie légitimité à être membre de cette commission ?

Suppléant : Thierry Dahan (énarque et magistrat à la cour des comptes, directeur de la culture et des sports à Lyon, rapporteur général  du Conseil de la concurrence).

L’ARMT et Hadopi sont résolument très proches ! les légitimités de nomination de ce collège sont posées. Les rapports techniques se sont enchaînés… l’indépendance de la HADOPI souffre de nombreux doute à la lumière de ces trois premiers CV. Il fallait s’y attendre…

Membres désignés par le président du Conseil supérieur de la propriété  littéraire et artistique:

Christine Maugüe, Conseiller d’Etat et membre du CSPLA depuis novembre 2009.
Maître des requêtes au Conseil d’Etat, Professeur associé à l’Université Panthéon-Assas (Paris II), Corédactrice en chef du Bulletin juridique des contrats publics. Conseiller d’Etat, est nommée en qualité de personnalité qualifiée en matière de propriété littéraire et artistique. La compétence sur la propriété intellectuelle et le droit d’auteur la qualifie pour cette commission, mais en tant que juge et partie…On lui doit aussi une expertise juridique sur les mécanismes de mise en Å“uvre du marché secondaire des fréquences et leur articulation avec les compétences des collectivités territoriales et approuve la première demande de cession partielle de fréquences Wimax d’une collectivité territoriale à une autre, mise en Å“uvre en Alsace.

Suppléant : Philippe Belaval . Entre Opéra de Paris et Bibliothèque F. Mitterrand, son ancrage dans la culture ne fait aucun doute, il est également conseiller d’Etat.

Personnalités qualifiées désignées sur proposition conjointe des ministres chargés des communications électroniques, de la consommation et de la culture :

Jean Berbinau, Membre du Conseil général des technologies de l’information, où il est chargé des missions relatives à la propriété intellectuelle, il a participé aux travaux sur la loi DADVSI (Droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information); secrétaire général de l’ARMT. Coauteur d’un rapport du Conseil  Général des Technologies de l’Information (CGTI), il prévoyait 18 000 suspensions d’abonnement à Internet par an… nulle doute qu’il sera un membre zélé de la commission !

Chantal Jannet, Présidente de l’Union féminine civique et sociale, sa bio est délicieuse au possible. Sa légitimité au sein de la Hadopi est relativement discutable… en dehors de sa compétence sur les sujets de consommation…Elle demeure l’inconnue de l’équation.

Jacques Toubon, ancien garde des Sceaux et ministre de la Culture de 1993 à 1995, membre de la commission Zelnik . Il a également beaucoup Å“uvré au Parlement Européen pour promouvoir la riposte graduée et s’opposer à l’amendement 138 , dit amendement Bono. Cet amendement fut remplacé, la commission Zelnik est strictement juge et partie considéré son attachement à la Présidence de la République, donc, si on ne peut avoir de doute quant à l’implication de J. Toubon dans la processus de mise en place de la Hadopi, on peut douter de sa partialité.

Personnalités qualifiées désignées par le président de l’Assemblée nationale et par le président du Sénat :

Franck Riester, Député UMP de Seine-et-Marne, rapporteur de la loi Hadopi 2, proche de Jean-François Copé et fidèle de Christine Albanel, il s’est opposé à certains dispositifs de Hadopi 2 alors que la loi était en débat à l’Assemblée. Le jeune député UMP a montré sa compétence dans les questions de protection des données personnelles… et selon lui, Hadopi respecte les droits de la défense… mi-figue mi-raisin, il fut parmi les premiers défenseur de cette haute Autorité…

Michel Thiollière, Sénateur de La Loire , membre du groupe UMP et rapporteur des lois DADVSI et Hadopi, il apparaît comme un membre zélé de ce collège, et fonde sa légitimité sur le projet DADVSI de Renaud Donnedieu de Vabres qui jamais ne fut réellement appliqué ou applicable…, sur Hadopi 1, anticonstitutionnelle, et sur son rapport Hadopi 2. Membre de du groupe d’études médias et nouvelles technologies et du conseil d’administration de France Télévision, ce Sénateur semble un acteur perspicace de ce collège, mais son passé de rapporteur ne légitime pas nécessairement son action, bien qu’il connaisse parfaitement le sujet.

Sont nommés membres de la commission de protection des droits de la Haute Autorité  pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet :

A la Commission de protection des droits (CPD), chargée de la mise en œuvre effective de la riposte graduée, on retrouve, également pour six ans , trois magistrats

Mireille Imbert-Quaretta : ancienne directrice de cabinet du ministère de la Justice, conseiller d’Etat spécialiste du droit pénal, elle est auteur de nombreux textes sur la justice et conseiller d’Etat. Hadopi est décidément très judiciaire !! Suppléant : Jean-François Mary.

Jean-Yves Monfort : ce magistrat s’est fait remarqué par une phrase dans la presse rappelant la fragilité des magistrats et les erreurs de procédures possibles, cette phrase n’ayant guère été appréciée par le ministère compétent en la matière. Ce juge au sang chaud se montre assez indépendant, selon lui, « les magistrats doivent être intellectuellement prêts à mordre la main qui les a nommés ». Gageons qu’il n’oublie pas cela ! Il est également membre du collège de la HADLE. Suppléant: Paul Chaumont.

Jacques Bille : , Professeur Associé Paris II, Conseiller à la Cour des Comptes (suppléant: Sylvie Toraille).

La compétence légale de ces trois magistrats ne pose pas le moindre doute, reste à savoir si leur compétence dans les questions techniques et les problématiques liées au Web seront à la hauteur.

F. Riester semble être l’un des membres les plus qualifiés pour appartenir à ce collège avec J.Y Montfort. Relativement indépendants, bien que F. Riester soit affidé au cénacle présidentiel, il a malgré tout amendé Hadopi dans un sens très pertinent concernant les libertés individuelles. M. Thollière paraît lui-aussi à sa place, de même que J. Toubon, bien que sur ce dernier, son lobbying européen pour l’amendement 138 l’ait quelque peu disqualifié.

Les questions se posent maintenant quant à la pertinence du choix de Chantal Jannet, n’ayant aucun lien de près ou de loin avec les problématiques liées au NTIC, au droit, à la protection des données personnelles, des droits des journalistes ou à toute autre question relative au web. Serait-ce un choix politique amical /-) ?

Owni souhaite donc la bienvenue à ces membres zélés du collège de la Hadopi dans le monde du Social Web, tout en sachant que leurs actions seront sous l’œil tout aussi zélé du web 2.0.

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